Cérémonie de remise des décrets de naturalisation

Mis à jour le 15/01/2016

René Bidal, préfet de l’Eure, a remis ce jour leurs décrets de naturalisation à 48 nouveaux citoyens français.

Mesdames et messieurs les élus,

Mesdames, messieurs,

Chers compatriotes,

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui à la préfecture, qui est la maison de la République, pour cette remise solennelle du décret grâce auquel vous recevez la nationalité française.

Vous avez choisi de devenir Français. Vous êtes venus accompagnés de votre famille et de vos proches, car c’est un moment qui est à la fois solennel et exceptionnel, marquant l’accueil fraternel que la République souhaite témoigner à l’endroit de celles et ceux qui la rejoignent. C’est aussi, nécessairement, un moment où les nouveaux Français, mesurent l’attachement qui, désormais, devra être le leur, aux valeurs de la République et à la France.

Permettez-moi tout d’abord de vous en féliciter. Cette cérémonie est l’aboutissement d’un parcours, souvent long et exigeant et le début d’un nouveau départ personnel puisque la France est devenue votre Patrie.

Ce moment est donc l’occasion d’un rappel sur le sens de l’accès à la citoyenneté, il est aussi l’expression d’un symbole, celui de l’intégration républicaine.

Vous êtes, dorénavant, des citoyennes et des citoyens français, à ce titre, faut-il le rappeler vous avez les mêmes droits et les mêmes devoirs que tous les autres.

Mais, si la République française vous confère des droits et des devoirs que vous précisent, d’ailleurs, les documents que l’on vous a remis, elle vous demande bien davantage : elle vous demande de l’aimer.

Au XIXème siècle, alors que la querelle entre les historiens allemands et français sur le statut de l’Alsace Moselle battait son plein, l’historien Fustel de Coulanges écrivait :

« Ce qui distingue les nations, ce n’est ni la race, ni la langue. […] Les hommes sentent dans leur cœur qu’ils sont un même peuple lorsqu’ils ont une communauté d’idées, d’intérêts, d’affections, de souvenirs, d’espérances. Voilà ce qui fait la patrie. […] La patrie, c’est ce qu’on aime ».

Tel est le message essentiel que je souhaitais vous transmettre aujourd’hui. En devenant Français, vous adhérez à nos valeurs communes ; celles qui sont issues de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et qui fondent, depuis cette date, notre pacte républicain.

Sachez Mesdames et Messieurs que la nationalité française ne correspond pas seulement à une carte d’identité, c’est surtout une adhésion du cœur et de l’esprit à ce qui nous rassemble, à ce qui nous unit.

En signant la charte des droits et des devoirs du citoyen français, en démontrant votre connaissance de l’Histoire et de la langue française, vous avez manifesté votre volonté d’adhérer aux valeurs fondamentales de la République Française.

Permettez-moi notamment d’insister sur le fait qu’être français, c’est nécessairement parler la langue française et l’apprendre à vos enfants, ce qui ne veut pas dire qu’il faut abandonner vos racines et ne plus parler la langue de votre pays d’origine ; au contraire, vos langues respectives enrichiront notre Nation. Mais le français doit être votre langue de raison et de pratique dans la vie courante et dans les liens sociaux, même si votre langue d’origine, votre langue maternelle, restera, évidemment, la langue de votre cœur, la langue de votre enfance, celle que l’on n’oublie jamais.

Pour illustrer ce message, je veux vous faire entendre les mots, un peu poétiques mais tellement chaleureux, de l’universitaire Esther Benbassa :

« J’ai aimé la France le jour où ma préceptrice arménienne a commencé à m’apprendre les premiers mots d’une langue dont la musicalité allait me marquer à jamais. […] Les Français qui vivent en France depuis des générations ignorent les coups de foudre que leur pays est capable de susciter. Ils l’aiment le plus souvent par habitude. Moi, je l’ai aimé avec la passion qui anime les amoureux fous ». (1)

La France, notre pays, a vu naître les Droits de l’Homme. Elle eut l’outrecuidance de vouloir parler de ces droits au nom de l’humanité toute entière, en proclamant « les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ».

Si, un temps, la France a parlé au monde et pour le monde, elle n’en tire aujourd’hui aucune arrogance déplacée, elle est simplement consciente, et se sent responsable d’une ardente obligation, celle de faire vivre et de protéger les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité qui ne peuvent cohabiter que s’y l’on y ajoute celles de laïcité et de solidarité.

En effet, la France est une République laïque. Le peuple, qui choisit ses élus, est formé d’une diversité de sensibilités et d’attachements à divers courants de pensée, à diverses cultures, à divers idéaux, à diverses religions.

Toutes sont respectables et doivent être respectées, dès lors qu’elles sont conformes à la loi. Cette diversité fait la richesse de notre Nation ; elle s’exprime dans le respect de ce qui unit et dépasse chaque individu. C’est cela qui définit le sentiment d’appartenance à la même communauté nationale et c’est cela, aussi, qui en garantit la cohésion.

La France est désormais votre Patrie. C’est une responsabilité personnelle éminente pour chacun d’entre vous, pour chacun d’entre nous.

 Montesquieu exprime ce devoir de participation citoyenne en quelques mots forts ; il écrit : « la démocratie borne l’ambition de chacun au seul désir, au seul bonheur de rendre à sa patrie les plus grands services. Les citoyens ne peuvent pas lui rendre, tous, des services égaux, mais ils doivent tous, également lui en rendre ».

En effet, votre contribution personnelle au fonctionnement des institutions nationales passe par la citoyenneté française à laquelle vous accédez et qui va s’exprimer, également, dans la transmission que vous ferez à vos enfants des valeurs qui fondent notre République.

Vous avez décidé d’adopter et de respecter les règles qui régissent notre société. La laïcité en est une. J’en ai parlé, elle garantit à chacun le libre exercice de son culte, dans le strict respect des convictions d’autrui et des autres religions.

Aucune appartenance, ethnique, religieuse, idéologique ou culturelle, ne peut remettre en cause le principe fondamental de liberté et d’égalité, notamment lorsqu’il s’agit de l’égalité entre les hommes et les femmes qui est désormais un dogme intangible dans notre République.

La devise républicaine n’a pas été donnée de façon aisée, naturelle et immédiate à notre Pays, elle a été conquise au fil de l’Histoire de France qui fut marquée par des combats physiques et idéologiques dont émergèrent les idéaux qu’expriment les principes et les droits que nous partageons aujourd’hui et que nous devons respecter et défendre.

Je vous engage à faire vivre cette belle devise républicaine, à être fiers de son universalité, fiers que ces mots accompagnent la représentation que les peuples du monde se font de la France et de la liberté.

C’est bien le sens qu’ont voulu donner ces mêmes pays du monde lorsque leurs capitales se sont parées des couleurs de notre drapeau national, au lendemain des attentats du 13 novembre.

Il vous revient, il nous revient, de montrer la voie de l’intégration, à tous ceux qui sont tentés par un repli ou une dérive vers des idéaux mortifères.

Tout au long de notre Histoire, nombreux sont ceux qui, comme vous aujourd’hui, ont rejoint notre communauté nationale ; tout aussi nombreux sont ceux qui ont enrichi la France de leur intelligence, de leur volonté, de leur talent et de leur créativité. Soyez-en les dignes successeurs. La diversité de vos origines est une richesse qui nourrit et fait rayonner le projet collectif de notre Pays mais vous devez le vouloir et l’exprimer dans vos vies.

En cette période de vœux, je vous souhaite à toutes et à tous de trouver, dans notre Patrie commune, la satisfaction de vos aspirations les plus chères, je souhaite que vos enfants, demain, fassent honneur au pays que vous leur avez donné.

Soyez assurés que la France place en eux les espoirs qu’elle place dans tous ses enfants.

La République a sa devise, elle a son drapeau, elle a son hymne : la Marseillaise, que je vous invite, dès à présent, à chanter ensemble.

Vive la République et vive la France.

(1) De l’impossibilité de devenir français, Nos nouvelles mythologies nationales, 2012.